Un nouveau Nom, le dernier tome de la Septologie de Jon Fosse vient de paraître. Cet écrivain norvégien, prix Nobel de Littérature 2023, s’est converti au catholicisme en 2013. Il perçoit désormais son œuvre comme « une prière à Dieu ».
Il est probable que jusqu’au 5 octobre 2023, le nom de Jon Fosse ne vous disait rien. En lui remettant cette année là le prix Nobel de Littérature, l’Académie suédoise a fait résonner l’énigmatique patronyme de cet écrivain norvégien de 64 ans aux oreilles du grand public (pour une prononciation à la norvégienne, dites « Ione Fosseu »), alors qu’il était jusque là confiné à des sphères très averties. Cette confidentialité s’explique : sa prose est exigeante, parce que traduite du nynorsk, langue synthétisant plusieurs dialectes norvégiens minoritaires, mais aussi parce qu’il n’use d’autres ponctuations que les virgules, écrit sans intrigue apparente et presque sans personnages… déroutant au premier abord, donc ! Son théâtre, qui l’a en premier rendu célèbre, a été adapté en France par de grands metteurs en scènes avant-gardistes comme Patrice Chéreau, Jacques Lassalle ou Claude Régy, ce qui n’assure pas un succès populaire. Malgré une renommée mondiale et des traductions dans plus de quarante langues, Jon Fosse avait tout pour être aux yeux du lectorat francophone un OVNI. Et cet OVNI norvégien apporte dans ses valises une chose plus étonnante encore : une œuvre littéraire qui est une quête du Christ.
La presse catholique française n’aura pas manqué de se réjouir d’une spécificité du nouveau Nobel : il s’est converti en 2013. Chose rare en Norvège, où le catholicisme est ultra-minoritaire. D’autant plus inattendue chez un écrivain qui, malgré l’éducation d’un milieu protestant piétiste, avait embrassé dans sa jeunesse le matérialisme athée du marxisme. Mais l’œuvre littéraire de Jon Fosse l’a rapidement mis face au Mystère qui réside au fond de la création artistique. Sa quête esthétique le pousse d’abord à se déclarer « gnostique », puis après un retour vers le protestantisme de son enfance, le mène petit-à-petit, guidé notamment par les lectures de Maître Eckhart et – plus inattendu – Heidegger et Derrida, sur la voie du catholicisme. Sa conversion intervient quatre ans après avoir rencontré personnellement Benoit XVI.
Cette conversion longtemps préparée, Jon Fosse, pourtant discret par nature, en témoigne volontiers. Il n’hésite pas à lui attribuer sa sortie d’un alcoolisme dont il a longtemps souffert, et se confie sur sa vie de prière. Dans son œuvre, le thème central de la Foi se précise de plus en plus et son roman en cours, la Septuologie – en référence aux sept jours de la Création – a pour narrateur un peintre âgé qui prie les heures et le rosaire. Chacune des sept parties se termine en outre par une prière. Mais le catholicisme de l’écrivain se situe surtout à un niveau plus profond de son travail : « mes livres sont une prière à Dieu » expliquait t-il au quotidien norvégien Vart Land en 2015. En érigeant son art comme forme de prière, Jon Fosse se place tout naturellement dans la grande lignée des artistes catholiques.
Cette posture a amené Anders Olsson, le président du comité Nobel, à justifier le choix de l’Académie cette année par cette belle formule : « ses pièces de théâtre et sa prose novatrices ont donné une voix à l’indicible ». L’indicible, est une notion vague en apparence mais juste : le nom de Yahvé n’est-il pas choisi parce qu’il est imprononçable ?
En France toutefois, la critique se contorsionne pour évoquer cette question, en particulier face à sa Septologie, novatrice histoire de conversion. « Scotché » par le roman, Télérama – dont les fondations chrétiennes relèvent désormais d’un aimable folklore – y lit une sorte de guide vers « une vision de plus en plus cosmique de l’être et du monde » et cela « par-delà tout mysticisme » bien sûr ! Le Monde admet pour sa part un roman sur la conversion à la charité, soulignant à raison mais non sans mépris que « l’appel auquel le personnage répond est épuré de toute bondieuserie ». Lui-même suédois, le journaliste Henrik Lindell, fait remarquer à ce propos dans La Vie que « dans les pays scandinaves, Jon Fosse n’est pas seulement perçu comme un auteur vaguement ouvert aux choses divines. Dans les milieux chrétiens, en particulier, il est naturellement lu pour ce qu’il est : un auteur profondément croyant, en l’occurrence catholique ». Professeur de littérature et histoire culturelle scandinave à la Sorbonne, Sylvain Briens ne dit pas autre chose : « je crois que l’œuvre de Jon Fosse est une œuvre qui croit en l’amour. Il n’y a pas d’ironie ou de scepticisme, c’est une sorte de grand appel : on peut être sauvé par l’amour. »
L’Amour est rédempteur. Le prix Nobel serait-il une sorte de Bernanos des fjords ? « Tout est grâce » aimait à dire l’auteur du Soleil de Satan. « Réussir à écrire et à bien écrire, c’est une grâce. Et je crois que peut-être, la vie en elle-même peut être une sorte de grâce » remarque en réponse l’écrivain norvégien. Grâce à Dieu, les écrivains n’ont pas fini de nous surprendre !
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